Tell El-Balamoun, à huit kilomètres au nord-est de la ville de Chirbin, entre Mansoura et Damiette, est une vaste chaîne de monticules grisâtres s’échelonnant au milieu des champs verdoyants marquant l’emplacement de l’ancienne cité pharaonique de Paiuenamon (l’île d’Amon) connue à l’époque grecque sous le nom de Diospolis Inférieure (Diospolis Katô, diospolis katv). Ce nom de Paiuenamon, qui est devenu en copte poynmoy, est à l’origine de la désignation de Tell El-Balamoun.Mais dans les temps les plus anciens, peut-être sous l’Ancien Empire, la cité était appelée Sma-Behdet, nom qui a été retrouvé sur certains monuments de Tell El-Balamoun.Le site se trouve près du village de Kafr El-Galal. Tous les monticules du Tell sont recouverts de tessons et débris de poteries.Ce Tell est impressionnant en raison de sa grandeur accentuée par sa présence au milieu des champs cultivés. Le Tell s’étend sur une distance d’au moins un kilomètre et sa hauteur maximale, au-dessus des champs environnants, est de 17 mètres 75.Le site de Tell El-Balamoun n’a pas beaucoup attiré l’attention des archéologues. Howard Carter y fit des fouilles en 1913. Il y décela des zones d’habitations domestiques datant de la Basse Epoque et de la période ptolémaïque (600 à 100 avant Jésus-Christ). Carter repéra encore une grande enceinte qui devait entourer le temple. Il trouva des bijoux en argent de la période ptolémaïque et un fragment de statue portant le nom de la ville Sma-Behdet. Par la suite, personne n’entreprit des fouilles sur le site jusqu’en 1977.Pendant deux saisons, en 1977 et 1978, l’Université de Mansoura travailla à Tell El-Balamoun sous la direction du Dr Francis Ghattas. Une énorme tranchée fut creusée sur la face nord du Tell et des maisons datant des périodes saïte et perse (600-400 avant Jésus-Christ) furent découvertes.Depuis 1991, le site a été arpenté et fouillé par une équipe du British Museum sous la direction de Jeffrey Spencer. Une étude systématique des poteries et des tessons sur le site montre que la ville fut occupée jusqu’au Vème siècle après Jésus-Christ, puis la cité fut abandonnée pour des raisons non encore déterminées.L’équipe britannique fit des fouilles dans la grande enceinte qui renfermait trois temples. Le plus grand était consacré au dieu Amon, le patron de la cité. Il ne subsiste rien de ces temples dont les matériaux ont été utilisés ailleurs. Selon l’équipe britannique ces temples auraient été construits par Nectanébo 1er (370 à 343 avant Jésus-Christ), et Psammétique 1er (664 à 610 avant Jésus-Christ).Les archéologues britanniques trouvèrent sur le site des plaques de faïence portant le nom de Nectanébo 1er, des petites plaques et objets rituels en cornaline, en bronze, en malachite, en turquoise et en or dans un dépôt de fondation de Psammétique 1er.Les listes des évêchés coptes ont retenu le nom de Tibaki Pounemou (<baki poynemoy) qui n’est autre que Diospolis Inférieure de Tell El-Balamoun. Il existe une autre cité de Diospolis Parva se trouvant à l’emplacement de la ville de Hou en Haute-Egypte au sud-est de Nag Hammadi.Dans l’Egypte ancienne cette cité était considérée comme la plus septentrionale, avec Damiette, étant située maintenant à 20 kilomètres de la Méditerranée. Mais ce site devait être encore plus proche du littoral car ce dernier s’est avancé vers le nord en raison de l’alluvionnement.L’évêché de Diospolis Katô (diospolis katv) est cité dans la liste publiée dans le manuscrit copte 53 de la John Rylands Library. L’historien cairote El-Maqrizi (1364-1443) ne parle que de l’évêché de Diospolis Parva situé à Hou, ignorant celui d’El-Balamoun.Cet évêché fut probablement fondé au IVème siècle et il est difficile de préciser la date de sa disparition. Le destin de cet évêché est peut être lié à celui de la ville voisine de Thmuis située plus à l’est.Jusqu’au VIIème siècle de notre ère, Thmuis resta une cité très prospère, tout en étant, depuis le IVème siècle, le siège d‘un évêché qui fut illustré par Sérapion (334-380) qui laissa de nombreux écrits dont une anaphore et une vie de Saint Macaire. Le nom de Thmuis provient du mot copte “thmoui”.Les anciens guides touristiques ignorent le site d’El-Balamoun. Par exemple, Emile Isambert dans son édition de 1878 à la page 407 cite Chirbin comme étant une station de chemin de fer sans parler du site d’El-Balamoun.Pour se rendre à Tell El-Balamoun en partant de Mansoura il faut prendre la route de Damiette. Après avoir dépassé la petite ville de Chirbin se trouve sur la gauche un embranchement de route longeant un petit canal. Une pancarte indique Kafr El-Galal. Le Tell se trouve sur la droite avant d’arriver à ce village.La ville de Diospolis Inférieure au Tell El-Balamoun fait partie de cette longue liste des cités du Delta du Nil maintenant disparues ou en ruines dont la plus imposante est celle de Tanis à San El-Hagar.A l’ouest de la branche de Rosette se trouvaient Hermopolis (Damanhour), Hiéraconpolis, Nikiou et Naucratis (près de Itaï El-Baroud). Entre les branches de Rosette et de Damiette se situaient Bouto (à l’est de Dessouk), Xoïs (Sakha au sud de Kafr El-Cheikh), Saïs (au nord de Tanta), Sebennytos (Samannoud), Bousiris (au sud de Samannoud), Diospolis Inférieure (Tell El-Balamoun), Iseon (Behbeit El-Hagara entre Samannoud et Mansoura). A l’est de la branche de Damiette se dressaient les villes de Mendès et de Thmuis (au nord de Simbellaouin), de Pharbeit (près d’Abou Kibir), de Phacusa (l’actuelle ville de Facous), de Léontoplis (au sud de Mit Ghamr), d’Athribe (près de Benha), de Léontopolis (Tell El-Yahoudieh près de Chibin El-Qanater), de Bubaste (au sud de Zagazig), de Pi Soped, de Pithom (ces deux sites dans la région du ouadi Toumilat), d’Avaris, de Pi-Ramsès (ces deux sites près de Qantir au nord de Facous), de Tanis (San El-Hagar au sud du lac Menzala), de Tennis (au milieu du lac Menzala) et de Daphnae (Tell El-Defenneh à l’ouest d’El-Qantara). Et il y en avait certainement bien d’autres.